L’accès au crédit constitue un enjeu majeur pour les petits exploitants agricoles togolais dont les besoins financiers suivent un flux de trésorerie cyclique occasionné par le caractère saisonnier de leurs activités. C’est en réponse à ces difficultés d’accès au crédit et pour soutenir les agriculteurs à faire face à la pandémie de coronavirus que l’Etat togolais a lancé le 28 juillet dernier un nouveau programme de crédit digital, à taux zéro dénommé « Yolim ». Pourquoi Yolim ? Comment ça marche ? Qui peut en bénéficier ?
Un accès facile au crédit
Désignant saison des pluies en langue locale Kabyè, « Yolim » est un programme de crédit digital, à taux zéro, par lequel l’Etat octroie un prêt aux petits exploitants agricoles, pour l’achat d’intrants (semences, engrais, pesticides, inoculum) et la location d’équipements agricoles. Il vient s’ajouter à différents autres programmes dont le porte-monnaie électronique (AgriPME) qui permet aux agriculteurs d’obtenir des subventions de l’Etat pour l’achat d’engrais, et la bourse agricole mise en place pour soutenir les différents acteurs du secteur agricole.
L’objectif avec Yolim est d’accroître la production agricole des petits exploitants en leur facilitant l’accès à des intrants et à des équipements agricoles. Il permet de promouvoir auprès de ceux-ci, l’utilisation des services mobiles pour accéder à des financements et aux facteurs de production essentiels.
De fait, le programme Yolim vise à améliorer l’inclusion digitale et financière des agriculteurs en leur permettant d’accéder instantanément à un crédit bancaire à distance, sur un téléphone basique grâce à la technologie USSD. « Depuis 2016, le Ministère de l’Économie Numérique accompagne le Ministère de l’Agriculture sur divers projets destinés à aider les agriculteurs en développant et utilisant des outils digitaux qui permettent d’améliorer leur productivité, la qualité de leurs récoltes ainsi que d’accroître leur production et leurs revenus. En permettant l’accès au crédit digital, le programme YOLIM constitue une étape décisive dans l’intégration des petits exploitants agricoles dans les chaînes de valeur agricoles », a indiqué Cina Lawson, Ministre des Postes, de l’Économie Numérique et des Innovations Technologiques au lancement de Yolim.
La mise en place du programme Yolim est aussi en ligne avec le plan de riposte agricole mis en place par le Gouvernement pour soutenir les acteurs du secteur agricole afin de faire face aux impacts de la crise sanitaire due à la COVID-19.
«Beaucoup de petits exploitants agricoles ont besoin d’argent pour payer les intrants et autres pendant la saison de semis. Cependant, il arrive souvent que leur revenu ne soit pas suffisant pour rembourser ces prêts, une situation due à l’insuffisance de l’investissement qu’ils effectuent avec leurs ressources limitées. Le programme YOLIM apporte donc une solution concrète à ce problème en leur fournissant un crédit sans intérêt remboursable seulement au moment des récoltes. YOLIM intervient ainsi pour soutenir la population agricole pour lui permettre d’améliorer ses productions et par ricochet ses revenus par un système agricole performant en ces temps difficiles de la COVID-19 » a indiqué Noël Bataka, Ministre de l’Agriculture, de la Production Animale et Halieutique (MAPAH).
De l’argent virtuel
Yolim, est un crédit virtuel visant à résoudre les difficultés du cash. Ce crédit se présente sous la forme d’un bon d’achat électronique, d’une valeur de 96 000 F CFA (146 Euros) versés directement sur le porte-monnaie mobile de l’agriculteur. Ce dernier, via le code USSD *820#, peut acheter dans un magasin partenaire, des engrais, des semences et pesticides mais également pour louer des tracteurs livrables en 72h.
« Grâce à un partenariat entre l’Etat et la société VAYA TROTRO, les bénéficiaires du programme YOLIM peuvent, via le code USSD *824#, louer des tracteurs à la journée ou à l’heure, avec leur crédit YOLIM, sur un modèle de « pay-as-you-go ». L’agriculteur a donc la possibilité de louer un tracteur pour le labour avec son téléphone portable», confie le ministre de l’agriculture.
A ce jour, selon le ministère de l’agriculture, cent vingt-deux (122) tracteurs répartis sur l’ensemble du territoire sont déjà équipés de GPS et soixante-neuf (69) agents de terrain sont formés pour le suivi-accompagnement.
Le crédit octroyé via ce nouveau dispositif est exprimé en Yolim (1 YOLIM= 1000 FCFA) et ne peut être retiré par l’agriculteur pour effectuer d’autres achats que le paiement d’intrants ou la location de tracteurs.
Selon les estimations du ministère de l’agriculture les 96 000 F CFA (soit 96 YLM) correspondent au montant total nécessaire pour l’achat d’intrants et la location de tracteurs pour une exploitation de soja-maïs ou soja-riz, couvrant une superficie d’un hectare à raison de 0,5 par culture.
Pour bénéficier du programme YOLIM, l’agriculteur doit produire des cultures à haute valeur ajoutée et vivrières, être enregistré par un agrégateur agréé et validé. L’agrégateur devrait être l’entreprise agricole qui achète habituellement la production de l’agriculteur bénéficiaire de Yolim. Il est garant du prêt de ce dernier et à ce titre, rembourse le crédit YOLIM pour le compte de l’agriculteur au moment des récoltes. Ce remboursement se fait à la récolte (nature) sans aucun taux d’intérêt à partir d’un système de suivi en place.
L’agriculteur devra disposer aussi d’une carte d’électeur valide ainsi que d’un numéro de téléphone mobile. Yolim ne fonctionnant qu’à partir du réseau GSM des deux opérateurs de téléphonie mobile (TogoCel et Moov-Togo).
Pour l’heure, seuls les agriculteurs de la filière Soja ayant pour culture secondaire le maïs ou le riz peuvent participer au programme. En effet, indique le ministère de l’agriculture sur son site web, « seuls les agrégateurs de cette filière ont pu présenter des garanties pour leurs agriculteurs ».
Atteindre 256 000 ménages agricoles
L’objectif affiché par le gouvernement au lancement du programme Yolim est de toucher 256 000 ménages agricoles fin 2020.
A la date du 18 aout, le site officiel de Yolim indiquait que 57 696 agriculteurs s’étaient déjà inscrits au programme YOLIM, soit l’équivalent de près de 5.5 milliards de F CFA. Parmi ceux-ci, seuls 3 741 exploitants agricole sont éligibles. De plus, 19 agrégateurs agréés sont validés sur 136 candidats et 210 magasins sont partenaires du programme sur toute l’étendue du territoire.
« Le processus d’enregistrement des agriculteurs, de validation d’agrégateurs agréés supplémentaires, mené par le MAPAH et le Ministère de l’Économie et des Finances se poursuit et l’objectif est de toucher 256 000 ménages agricoles », confie le ministre de l’agriculture.