Kidnapping à Lomé de l’opposant béninois « Frère Hounvi » : que sait-on ?

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Le 12 août dernier, l’opposant béninois connu dans les sphères médiatico-politiques et sur les réseaux sociaux sous le pseudonyme Frère Hounvi , a été kidnappé par plusieurs hommes à bord d’une fourgonnette immatriculée au Bénin, alors qu’il était sorti faire des courses à quelques mètres du lieu de sa résidence. Il est depuis gardé à la Brigade économique et financière (BEF) et selon nos informations, sera présenté dans les prochains jours devant le procureur spécial près la CRIET (Cour de répression des enrichissements illicites et du terrorisme) à l’issue de sa garde-à-vue. Des deux côtés de la frontière, les autorités se refusent à commenter cette affaire qui risque d’empoisonner davantage les relations déjà quelque peu tendues entre les deux pays.

Frère Hounvi  se souviendra très longtemps de cette nuit du 12 août 2024. Il était sorti aux alentours de 22 heures  et avait parcouru quelques mètres à peine pour faire des courses lorsque quatre  d’individus l’embarquèrent de force dans une fourgonnette immatriculée au Bénin, sous le regard médusé et impuissant des riverains. La suite, c’est l’un de ses conseils, Me Aboubacar Baparapé, avocat au Barreau du Bénin et président de l’Organisation pour la défense des droits de l’homme et des peuples  qui a pu avoir accès à lui à la BEP, qui le raconte. « Aussitôt embarqué, il a été encagoulé et un des ravisseurs a mis le coude sur son cou jusqu’à étouffement. Il a failli être étranglé durant le parcours et a presque perdu connaissance. A un moment, les hommes qui le détenaient s’interrogeaient s’il fallait le jeter dans une brousse ou à la mer», relate l’homme de droit.

Exilé au Togo depuis 2019  

Influenceur, web-activiste,  Frère Hounvi , de son vrai nom Steve Amoussou,  est un farouche opposant au régime de Patrice Talon. Dans des chroniques régulières abondamment relayées et très suivies sur les réseaux sociaux qu’il concluait par ces célèbres mots bien distinctifs, « Opposants sans peur, Béninois sans reproches, votre Frère Hounvi c’était », il s’en prenait de manière vive et très acerbe au gouvernement de la Rupture et du Nouveau départ.

Tantôt annoncé en France, tantôt au Canada, aux Etats-Unis ou encore en Angleterre, c’est en réalité au Togo dans le quartier Adidogomé, que le Frère Hounvi  vivait son exil et dans la clandestinité depuis 2019.

Traque numérique

D’après plusieurs sources, c’est en traquant les sieurs Féréolle Akuesson et Roméo de Montaguère, présumés mener des activités suspectes, que le Centre béninois des investigations du Numérique est  tombé  sur les traces du Frère Hounvi.

En effet, c’est en fouillant dans les appareils (téléphone et ordinateur) de Féréolle Akuesson interpellé pour cybercriminalité  le 04 août dernier en pleine messe à l’église, que les enquêteurs auraient  découvert que celui-ci apportait un appui technique à travers notamment le montage des vidéos, au Frère Hounvi.

Son interrogatoire aurait par ailleurs conduit à l’arrestation de Roméo de Montaguère, dont le contenu des appareils a établi des liens avec l’opposant.

C’est donc l’analyse des données de l’appareil de ces deux personnes qui aurait permis de localiser à Adidogome, le frère Hounvi.

Collaboration judiciaire ?

A ce stade, aussi bien les autorités béninoises que togolaises n’ont fait aucun commentaire sur l’affaire. Un officiel a juste concédé en off  qu’il n’y a aucune chance que Lomé ait collaboré à cette opération. «  S’il y avait eu entraide judiciaire, ç’aurait été les Togolais qui auraient interpellé M. Steve Amoussou avant de le remettre selon une procédure bien précise aux Béninois, comme ce fut le cas par exemple pour l’homme d’affaires  Kikissagbé Godonou Bernard alias KGB est arrêté le lundi 31 mai 2018 à Lomé », a-t-il commenté. « Entraide, je n’y crois pas du tout. Défaillance de nos services, sans doute » a-t-il conclut.

De fait, cette rocambolesque affaire de kidnapping risque de ne  pas arranger les relations déjà tendues entre Lomé et Cotonou.