« Antovi cantine » : quand le « bad buzz » donne de l’appétit !

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Antovi cantine

L’inauguration le 13 juillet dernier d’un restaurant dénommé « Antovi cantine » (le restaurant du petit singe, en mina) qu’abrite le site de l’Institut français du Togo ( IFT) a créé une vive polémique. De nombreuses personnes, notamment sur les réseaux sociaux,   dénoncent une démarche insultante envers les Noirs, dans le contexte mondial du mouvement Black lives matter. Dans une interview accordée à FOCUS INFOS, Nancy-Lynn d’Almeida, l’une des trois jeunes entrepreneurs, cofondatrice de la cantine, défend le concept « Antovi » et invite  les Togolais à sa découverte.

Focus Infos : Vous êtes une des cofondatrices  d’une cantine dont le nom « Antovi » fait polémique. D’où vient-il?

Nancy-Lynn d’Almeida: Ce projet de restaurant est une initiative de  trois jeunes Togolais,  Greta Lawson-Gallus, Armand Adjalé et moi-même, Nancy-Lynn d’Almeida. Nous avons créé depuis septembre 2019 « Antovi Cantine » et pour nous, ce nom n’a rien d’une insulte. Nous l’avions choisi parce que nous voulions une dénomination qui à la fois marque, fasse sourire et exprime notre vision. Le singe est  le symbole des trois jeunes entrepreneurs que nous sommes,  confrontés à des difficultés quotidiennes avec son côté débrouillard, créatif, capable d’impressionner et de progresser.

F.I : Comprenez-vous qu’une telle dénomination d’un établissement situé sur un site appartenant à la France, dans le contexte mondial tel que le mouvement Black lives matter, ait pu choquer ?

N-L.A : Honnêtement, nous ne comprenons pas cette polémique. Il est important de noter que ce n’est pas l’IFT ni l’ambassade de France qui ont choisi ce nom ou  financé notre projet. Nous avons simplement saisi une opportunité qu’ils nous ont offerte à travers l’appel d’offres de recrutement d’un restaurateur qu’ils ont lancé. Nous avons donc avec eux un contrat de partenariat.

Le mouvement Black Lives Matter n’a de sens que si on connaît son histoire, son origine et qu’on décide volontairement de manifester. La démarche est la même pour « Antovi cantine ». Il faut plutôt chercher à comprendre notre concept, à venir à notre découverte, saisir ce que nous pouvons apporter aux Togolais, avant de porter un jugement.

F.I : Aviez-vous mesuré la proportion que pouvait prendre la polémique ?

N-L.A : La Bible qui dit que toute chose concourt au bien de celui qui aime Dieu.  Nous  sommes ouverts à la critique depuis que nous avons lancé ce projet de restaurant. Le plus étonnant, c’est que cette polémique nous apporte davantage de visibilité. Nos pensées vont à  toutes ces personnalités qui n’ont pas alimenté cette polémique, mais ont plutôt choisi de prendre leur temps, de se déplacer , de venir vous voir et de poser des questions.

Je pense pour ma part qu’au lieu de débattre sur un nom, il faut davantage se concentrer sur le fait qu’il y a un restaurant fondé par des Togolais, pour des Togolais et qui n’emploie que des Togolais. Ou que notre restaurant n’utilise  que des produits frais,  100 % naturel ; sans aucun produit surgelé.  Ou encore que nous  travaillons  avec des producteurs et éleveurs locaux.

C’est là où la polémique est malheureuse parce que si jamais le projet ne prospérait pas, il n’y aura pas que nous  qui en pâtirions ; mais également les revendeuses et revendeurs  qui tous les matins, dès 5 heures, nous attendent. Toute cette chaîne n’aura plus de revenus.

Antovi cantine
Antovi cantine ( dans les locaux de l’Institut Français de Lomé)

F.I : Songez-vous à changer de nom si la polémique persistait ?

N-L.A : Jamais, d’autant plus qu’ « Antovi » a désormais encore plus d’importance pour nous. Nous rencontrons des difficultés en tant que jeunes et ce nom exprime véritablement l’esprit et la vision de notre projet. Nous assumons complètement qui nous sommes : fiers d’être noirs et encore plus  fiers d’être Togolais, en promouvant les produits du terroir. Nous démontrons que nous sommes ouverts d’esprits, pas du tout complexés. Nous faisons  du business, mais nous valorisons d’abord la culture togolaise et créons de l’emploi. « Antovi » n’a aucune appartenance de quelque nature  que ce soit ; mais cet épisode nous a fait sentir que nous n’étions pas seuls.

F.I : Comment avez-vous été sélectionné par l’Institut français ?

N-L.A : Nous  avions déjà connu  du succès à l’espace VIVA où nous avions démarré. Puis, nous avons décidé de nous installer ailleurs. Nous avons saisi alors l’opportunité d’un appel d’offres lancé par l’’IFT, encouragé par nos proches. Face à nous, il y avait des restaurateurs expérimentés et d’autres prestataires qui ont fait leurs preuves aussi bien sur le plan du professionnalisme que de la qualité de leur service. Cependant, c’est notre offre qui a été retenue ; Dieu merci.

F.I: Que proposent vos cartes de menus ?

N-Lynn. A : Notre cantine fait la promotion des plats du terroir. Nous proposons aussi  des plats originaux qui sont des spécialités d’ «Antovi cantine».  Nous offrons le service traiteur ou des plats à emporter. Antovi, c’est par ailleurs des cocktails et des glaces.


*** L’interview est illustrée avec les images de la cantine. Les promoteurs préférant mettre en exergue le restaurant.