Ce n’est pas le genre de la maison. En toutes circonstances, le pouvoir togolais a le succès toujours modeste. La méthode de gouvernance le commande ; le caractère du président de la République l’y incite. Pourtant, après la réussite de la visite officielle en France, Faure Gnassingbé a de quoi pavoiser par rapport à ce qui fut un succès diplomatique, mais aussi politique.
L’accueil fut plus que chaleureux de la part des officiels lors du séjour français de Faure Gnassingbé. Au Palais de l’Elysée comme à celui de Luxembourg, le président togolais fut cordialement reçu avec honneur ; Emmanuel Macron donnant même du «Cher ami » au départ de son hôte. Pour ceux qui spéculaient sur l’état des relations entre les deux pays, et surtout entre les deux hommes, la réponse fut on ne peut plus claire.
Il faut dire que Lomé bruissait de rumeurs, reprises et amplifiées sur les réseaux sociaux par les activistes de la diaspora, sympathisants de la Dynamique Kpodzro, qui établissaient d’exécrables relations entre Lomé et Paris et le rejet que manifesterait le président français envers son homologue togolais. Le contexte n’était pas nécessairement favorable. Une décision controversée de la justice française dans l’affaire Bolloré dans laquelle le Togo est cité, a été rendue quelques jours seulement après l’annonce de la visite de Faure Gnassingbé à Paris.
La contestation jusqu’au-boutiste voire surréaliste des résultats de la dernière élection présidentielle par le perdant qui fait une « guérilla virtuelle » sur les réseaux sociaux, participe à ce contexte difficile renforcé par la polémique sur l’authenticité de la lettre de félicitations adressée au Chef de l’Etat togolais au lendemain de son élection. Les interventions intempestives quoique marginales du député français Sébastien Nadot, viennent tout aussi jeter un peu de flou kafkaïen sur la situation ; lui qui à la veille encore du début de la visite officielle, mettait en doute la tenue de celle-ci, évoquant l’absence de la venue à l’Elysée de Faure Gnassingbé dans l’agenda officiel du président français.
Au surplus annoncé par les médias pour le 1er avril avant d’être considéré comme reporté sine die, le voyage en France apparaissait pour certains observateurs comme un « guet-apens ». D’autant plus que depuis l’arrivée au pouvoir d’Emmanuel Macron, c’est la première du Chef de l’Etat togolais dans l’Hexagone, au contraire de la plupart de ses homologues de la sous-région.
Leadership régional
De fait, le séjour parisien de la semaine dernière fut forcément un succès diplomatique et emporte par ailleurs un enjeu de politique intérieure, quoique participant aux bonnes relations qu’entretiennent depuis 60 ans les deux pays. Il a nécessairement deux autres lectures. D’abord, la reconnaissance des réformes structurelles économiques et celles tendant à l’amélioration du climat des affaires au Togo ainsi qu’à a son attractivité.
Mais aussi, les réformes politiques engagées depuis quelques années dont les plus emblématiques furent celles institutionnelles et constitutionnelles de 2019 ainsi que l’organisation d’élections présidentielles, législatives, municipales dont les dernières remontaient à presque 40 ans. Souvent cité par le passé comme le mouton noir de la sous-région, le Togo fait désormais sur beaucoup de plans, figure d’exemple et de modèle.
Le séjour hexagonal est ensuite une reconnaissance du leadership régional du Togo sur les questions sécuritaire et de lutte contre le terrorisme pour lequel, le pays est en première ligne. « Concernant la situation régionale et la violence dans la région du Sahel, j’ai exprimé au président Macron mon engagement total pour contribuer au rétablissement de la paix et de la sécurité dans toute la sous- région, en rappelant notamment la présence de 1.100 militaires togolais au sein de la MINUSMA », a d’ailleurs indiqué le numéro 1 togolais à l’issue du déjeuner avec le président français.
Tout ceci explique en grande partie le gros échec de la tentative de mobilisation de la diaspora togolaise contre le séjour du Chef de l’Etat en France par la DMK. A son appel, seuls deux activistes ont répondu, malgré le fait qu’un journaliste à la moralité douteuse a cru devoir indiquer l’hôtel de résidence de Faure Gnassingbé dans un article truffé de fake news. Il faut aussi noter qu’à la veille de cette visite, le Quai d’Orsay a mis fin à la polémique sur la lettre de félicitations adressée au président togolais au lendemain de l’élection présidentielle : elle est bien authentique.