La Responsabilité Sociale des Entreprises (RSE), une affaire (aussi) d’Etat !

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Edem d’Almeida, fondateur d'Africa Global Recycling

Les défis imposés par les mutations profondes qui s’opèrent dans le monde et pour le monde, ont inscrit le gouvernement togolais dans une nouvelle dynamique de développement économique et humain. Cette dynamique se traduit davantage dans les nombreux efforts déployés dans la mobilisation des acteurs du secteur privé, de la société civile et même de l’informel pour porter un développement soutenu et durable qui place l’Humain au cœur des réponses pour le présent et l’avenir.

Une chronique d’Edem d’Almeida

Ainsi un des leviers actionnés, davantage à la faveur des expériences, des contradictions, des fragilités, des traumatismes et des risques, par ailleurs amplifiés par la crise du COVID-19, est le concept de la Responsabilité Sociale des Entreprises (RSE) ; il connait un engouement certain mais sa portée reste profondément méconnue…et pour cause.

Le vocabulaire « SOCIAL » qu’on lui attribue, et encore plus dans le contexte spécifique africain, l’ont confiné longtemps dans une vision philanthropique et humanitaire et la crise sanitaire n’a fait qu’accentuer cette compréhension de la RSE.

Les entreprises ont rivalisé d’imagination dans leur communication, pour la distribution de masques, de gel hydro-alcoolique, de dispositifs de lave-mains aux populations et aux personnels soignants ; elles ont par ailleurs été très sollicitées pour participer au financement de la lutte contre la propagation du Coronavirus.

La perception étriquée du Social pour la RSE, tend à faire oublier, trop souvent, le fondement de l’entreprise : la création de richesses, la recherche permanente de profits même si cette recherche peut ne pas être antinomique à la préoccupation sociale.

Si faire du « social » ou de l’humanitaire correspond à soulager la souffrance dans le moment ou encore dans l’urgence et la nécessité d’une survie, la recherche permanente de profit pour l’entreprise s’inscrit aussi dans la nécessité d’une survie.

Alors qu’elle représente un vrai levier de développement et de performance pour les entreprises, les organisations, il apparait, à mon sens, pertinent de reconsidérer les fondements de la RSE pour en saisir les contours, les adapter à notre contexte et mieux porter la dynamique constructive du Togo dans laquelle nous tirerons tous partie.

Si la RSE est d’abord définie comme l’intégration volontaire de préoccupations sociales et environnementales dans leurs activités commerciales et leurs relations avec leurs parties prenantes, elle n’en reste pas moins d’abord un état d’esprit du ou des dirigeant(s), une attitude, une vision, un engagement qui influencent le degré et la maturité des pratiques en terme de responsabilité et d’actions dans la recherche d’un équilibre entre l’économique, le social et l’environnement.

Elle s’appuie sur 7 piliers pour définir sa stratégie et conjuguer enjeux sociétaux, croissance économique et développement durable :

  • La gouvernance
  • Les droits de l’homme.
  • Les relations et conditions de travail.
  • L’environnement.
  • La loyauté des pratiques.
  • Les questions relatives aux consommateurs.
  • Les communautés et le développement local.

Des piliers qui représentent tous des enjeux majeurs de transformation, de changement de culture, d’adaptation, d’innovation et surtout d’anticipation dans les relations que l’entreprise ou l’organisation entretient avec ses parties prenantes internes ou externes.

C’est, pour ce faire, la création de chaines de valeurs avec un ensemble de stratégies, de politiques et de pratiques, parties intégrantes des opérations et du processus décisionnel en réponse aux défis portés par l’éthique, le développement des communautés, l’impact de l’activité sur l’environnement, les conditions aux travail ou encore les droits humains. Mais ne nous y trompons pas, la RSE a un coût, et elle n’est pas gage de rentabilité.

Une des fausses idées que nous nous faisons dans notre pays sur la RSE, c’est de continuer à croire qu’il s’agisse uniquement d’une affaire de grandes entreprises, multinationales, ou à défaut que d’entreprises. C’est l’affaire de tous ! Une affaire de petites et moyennes entreprises, une affaire d’institutions, une affaire d’Etat, une affaire de la base !

L’émulsion autour de la RSE portée davantage par les organes de notre Ministère du développement à la base, de la jeunesse et de l’emploi des jeunes, ainsi que la Coalition Nationale pour l’Emploi des Jeunes (CNEJ) démontre à suffisance que nous avons changé définitivement d’époque ; l’Etat n’est plus l’Ecosystème. Le pouvoir politique se transforme et s’acharne à devenir plutôt le cœur d’un écosystème devant créer, plus que jamais, d’une part, des approches nouvelles de coopérations et de relations, gage de durabilité, et d’autre part, d’être un terreau fertile pour créer et drainer, par les entreprises et organisations, de nouveaux écosystèmes, acteurs de Développement et de Responsabilité.

Ces nouvelles relations et coopérations qui mettent le pouvoir politique à l’épreuve des modèles d’entreprise seront corollaires, non seulement, de la poursuite des réformes de modernisation engagés dans notre pays mais aussi de choix audacieux et pragmatiques pour repenser, par exemple, des approches nouvelles de la fiscalité ou de la relation avec la Diaspora comme levier de performance et de durabilité.