Le secteur du ciment, sous l’impulsion des engagements climatiques pris par le Togo dans le cadre de l’Accord de Paris, s’est doté d’un plan d’action visant la neutralité carbone à l’horizon 2050. Ce tournant stratégique, inédit dans l’histoire industrielle du pays, s’inscrit dans une dynamique mondiale portée par la Global Cement and Concrete Association (GCCA).
La feuille de route a été élaborée par Cementis International, société de conseil spécialisée, sur la base de la méthodologie reconnue de la GCCA a été présentée à la presse locale le lundi 30 juin 2025 à Lomé. Elle s’appuie sur une expertise internationale mobilisée par l’École polytechnique fédérale de Lausanne (EPFL) et le Climate Technology Centre and Network (CTCN) des Nations Unies. À travers ce réseau, les entités désignées par les États (National Designated Entities) ont facilité les échanges avec les autorités togolaises.
Un secteur à fort potentiel d’émissions
Actuellement, les émissions de dioxyde de carbone générées par l’industrie cimentière nationale sont estimées à environ 0,9 million de tonnes par an pour la seule production destinée au marché local. Mais selon les projections, ce volume pourrait doubler d’ici 2050 pour atteindre 1,8 million de tonnes, en l’absence de politiques d’atténuation. Une hausse due principalement à la croissance continue de la demande en matériaux de construction, portée par l’urbanisation et les projets d’infrastructure.
Face à cette trajectoire, la feuille de route propose deux leviers structurants pour réduire l’empreinte carbone du secteur.
Le ciment LC3, une alternative moins polluante
Le premier levier repose sur la réduction du facteur clinker, principal responsable des émissions de CO₂ dans le processus de fabrication du ciment. Aujourd’hui, le clinker représente jusqu’à 65 % du contenu du ciment togolais. L’objectif est de ramener cette proportion à 40 % d’ici 2050.
Pour y parvenir, l’introduction à grande échelle du ciment LC3 (Limestone Calcined Clay Cement) est privilégiée. Ce matériau, déjà éprouvé dans d’autres pays africains comme le Ghana, utilise de l’argile calcinée et du calcaire, ce qui permet de réduire jusqu’à 40 % des émissions sans altérer les performances techniques du produit. Sa généralisation suppose toutefois une révision des normes nationales, afin de l’intégrer pleinement dans les standards de construction locaux.
Des combustibles alternatifs pour remplacer le charbon
Le second levier concerne l’énergie thermique utilisée dans les fours à clinker. À ce jour, le charbon reste la principale source d’énergie pour l’industrie cimentière au Togo, avec un coût environnemental élevé. Le recours aux combustibles alternatifs, tels que les déchets municipaux ou les résidus agricoles, offre une voie prometteuse.
Cette approche est déjà pratiquée à grande échelle en Europe, où certains sites industriels atteignent jusqu’à 90 % de taux de substitution énergétique. En Afrique, des exemples comme celui de l’Ouganda démontrent la faisabilité du modèle : une cimenterie y couvre 65 % de ses besoins thermiques grâce à la valorisation de résidus agricoles.
Une mise en œuvre progressive et partenariale
Pour concrétiser ces ambitions, le secteur cimentier togolais compte sur une collaboration étroite avec les pouvoirs publics. L’adaptation du cadre réglementaire, notamment en matière de normes techniques et environnementales, sera déterminante. Les autorités seront également appelées à soutenir la mise en place des infrastructures de collecte et de traitement des déchets nécessaires à l’adoption des combustibles alternatifs.
La publication de la feuille de route ne constitue qu’une première étape. Des actions concrètes sont attendues dans les mois à venir, à travers l’organisation d’ateliers de sensibilisation, de sessions de formation et d’échanges de bonnes pratiques.
