Les députés ont adopté le 29 juin dernier à l’unanimité le projet de loi autorisant la cession du capital de la Nouvelle Société Cotonnière du Togo (NSCT). Le texte va permettre à l’Etat de rentrer en négociation avec le singapourien OLAM en vue de lui céder tout ou partie de sa participation dans le capital social.
Pour Sani Yaya, ministre de l’Economie et des Finances, cela répond au souci du gouvernement de trouver un partenaire stratégique de renom pouvant contribuer, grâce à son expertise dans le domaine de l’agro-industrie, à l’atteinte des objectifs de l’axe 2 du plan national de développement (PND2018-2022). Le groupe asiatique, spécialisé dans le négoce et le courtage de denrées alimentaires est déjà présent en Afrique dans le café, le cacao, le coton et l’huile de palme. L’objectif visé par l’exécutif est de doubler les rendements en modernisant la filière et en garantissant les prix aux producteurs.
Malgré sa production en baisse l’année dernière, le coton reste le 4e produit d’exportation après le phosphate, le clinker et le ciment. Autant dire qu’il fait partie des « bijoux de famille » des Togolais. De fait, comme pour ses devancières, cette privatisation questionne, non pas tant sur son principe, mais sur ses conditions et modalités.
En effet, l’Etat n’a pas pour vocation de gérer des sociétés commerciales ni de faire du profit , sauf à se réserver dans des situations particulières et dans un cadre bien défini, des domaines stratégiques comme l’eau, l’énergie etc. La cession de tout ou partie de la participation du Togo dans la NSCT n’est donc pas un problème en soi, qui plus est dans le contexte d’une économie de marché, et du choix du capitalisme, ouvert sur un monde globalisé. L’idée que l’Etat continuerait sur bien de secteurs à s’ériger en opérateur économique, avec des résultats peu probants parce que dirigés par des hauts fonctionnaires plutôt que des entrepreneurs ou des managers, devrait nécessairement évoluer.
Cependant, les conditions de ces opérations posent problème parce que trop souvent, le choix des partenaires, aussi prestigieux et pertinents soient-ils, est issu de processus dont la transparence et la clarté ne sont pas les premières vertus. Les dispositions financières sont quant à elles entourées d’omerta. Ce ne sont pas les débats parlementaires menés au pas de charge, avec des discours convenus couverts de salamalecs qui risquent d’y changer quelque chose.
L’autre réserve porte sur la place, ou le peu de place pour être plus exact, qui est accordé au secteur privé local dans ces opérations et dont l’Etat devrait nécessairement et obligatoirement faire la promotion. Il est quasi absent de ces mouvements parce qu’aucune place ne lui est accordée.
La place privilégiée serait par exemple de réserver systématiquement une part du capital aux privés togolais qui peuvent s’associer ou créer des consortiums pour participer à ces opérations. Ils ne s’en plaindront jamais publiquement sauf dans des cercles fermés et les fenêtres bien closes, de ce qu’ils sont invités à participer à des efforts contributifs ( sommets, forums, COVID-19 etc.), à jouer les figurants lors des tables rondes ou rencontres. Et lorsqu’il s’agit d’ « opérations juteuses », pouvant contribuer à créer un vrai écosystème performant, à renforcer le secteur privé local, le véritable créateur de richesses et d’emplois, ils ne sont même pas sur le banc de touche pour espérer « entrer en jeu » ; se retrouvant en spectateurs dans les gradins. Aidons-les à nous aider à bâtir un secteur privé dynamique et conquérant.