Quelques jours après sa création, le CNAP (Concertation nationale entre acteurs politiques) connaît déjà sa première défection. Après avoir émis des réserves dès l’annonce de la mise en place de ce nouveau cadre de discussions lancé entre majorité et opposition, le Comité d’Action pour le Renouveau (CAR) a décidé la semaine dernière, d’en claquer la porte. Raison officielle «solder la crise post-électorale ». Tel est en substance le contenu de la lettre de notification signée par le premier vice-président du parti, Yendouban Konlani envoyée au ministre de l’Administration territoriale et de la Décentralisation , Payadowa Boukpessi, pour lui signifier la « suspension de la participation du CAR au dialogue ».
Pourtant, tout avait bien commencé. Alors qu’aucun dialogue structuré entre pouvoir et opposition n’a plus eu lieu depuis celui organisé sous l’égide de la CEDEAO entre 2017 et 2018, et au lendemain de la débâcle électorale de l’opposition, désormais prise dans une léthargie dont l’ampleur reste inédite , empêtrée dans ses contradictions et ses conflits de leadership, les deux parties ont fini par prendre langue sur initiative du Gouvernement. Le prétexte fut celui de l’organisation des élections régionales. Mais il s’agit surtout de créer un cadre où auront lieu les discussions devant permettre une vie politique apaisée. L’essentiel n’étant d’ailleurs pas là, mais plutôt dans le fait que la classe politique togolaise se reparle de nouveau. Elle a, dans son écrasante majorité, compris cela : de l’UFC au NET, en passant par la CPP ou la très contestataire ANC, qui par la voix de son vice-président, a émis un à priori favorable vis-à-vis de l’initiative.
Dans ce contexte, en adoptant cette posture isolée de refus, le CAR se marginalise davantage. En effet, depuis les glorieuses 90 sanctionnées par de bons résultats aux premières législatives multipartites post-conférence nationale souveraine, le parti de feu Yawovi Agboyibo est tombé dans un cycle de défaites électorales, entretenues par des positions aussi illisibles qu’inopérantes. En courant d’abord derrière l’UFC considérée à l’époque comme une « formation radicale », ensuite derrière l’ANC qui lui a succédé sur ce positionnement, puis le PNP, le CAR a fini par perdre son identité voire son âme, brouillé son message et embrouillé ses sympathisants, pour avoir tourné le dos à l’idée sur laquelle il s’est construit : les progrès politiques se réalisent grâce au dialogue.
Sans tirer aucune leçon des échecs de sa nouvelle posture dont personne n’est dupe, la formation du « Bélier de Kouvé » a trouvé un nouveau lièvre derrière lequel faire la course au radicalisme : la Dynamique Kpodzro. Qui s’en est rapidement félicitée, presque heureuse de sortir enfin de son isolement. En continuant à emprunter cette voie sans issue et en l’absence désormais de sa figure emblématique, le CAR risque de demeurer encore longtemps ( et pour toujours ?) en panne.