« La nouvelle orientation contribuera considérablement à l’amélioration du revenu des producteurs du coton »

0
1468

Interview:Kouroufei Koussouwè, président de la Fédération nationale des groupements de producteurs de coton au Togo (FNGPC)

Si l’Etat est en passe de céder au groupe singapourien OLAM 51 des 60% de parts qu’il détient dans le capital de la Nouvelle société cotonnière du Togo (NSCT), les producteurs de coton conservent quant à eux, leur part minoritaire de 40 %. Dans cette interview exclusive accordée à Focus Infos, le président de la Fédération Nationale des Groupements de Producteurs de Coton au Togo (FNGPC) Koussouwè KOUROUFEI donne son avis sur la décision de l’Etat de céder son capital, évoque l’arrivée du nouveau partenaire OLAM et la situation de la filière coton au Togo. Lecture.

Focus Infos : Quelle est votre réaction après la décision de l’Etat togolais de céder à OLAM 51% de ses parts dans la NSCT ?

KOUROUFEI Koussouwè: Les producteurs de coton sont émus et satisfaits de la décision de l’Etat togolais de céder à OLAM 51% de ses parts sociales dans la Nouvelle Société Cotonnière du Togo dans le but de redonner un nouveau souffle à la production cotonnière après de multiples réformes dans ce secteur agricole. Cette multiple réorientation de la part de l’Etat a toujours redonné vie à la filière. Le souci majeur du gouvernement est la transformation de la production locale qui reste ici insuffisante pour la rénovation des usines textiles.

Depuis la création de la Nouvelle Société Cotonnière en 2009, la production tourne autour de 100 000 tonnes avec un rendement avoisinant 700 Kilogrammes à l’hectare ces dernières campagnes où la production la plus élevée est de 137 000T au cours de la campagne 2018/2019. La vision du gouvernement pour cette filière est de produire 200 000 tonnes d’ici 2022. Malgré les deux ans restants, fort est de constater que la production évolue toujours en dents de scie. Tout ceci pousse l’Etat à réorienter la filière cotonnière pour sa redynamisation. Cette confiance est déjà née entre les producteurs et le gouvernement. La nouvelle orientation ne va ni faire du tort aux producteurs ni à l’économie togolaise mais plutôt contribuera considérablement à l’amélioration du revenu des producteurs du coton ainsi que de la valeur ajoutée au produit intérieur brut.

 

FI : Aviez-vous été consulté pour augmenter par exemple vos parts de 40% ? L’auriez-vous accepté si ce fut le cas ?

K.K. La part sociale des producteurs dans le capital social de la NSCT qui est de 40% a été donnée par l’Etat, soucieux de leur bien-être. Les producteurs ne disposent pas de moyens financiers nécessaires pour racheter les parts de l’Etat et faire face aux ambitions et objectifs du PND qui sont entre autres, la transformation du coton produit au Togo. Dire que l’Etat a consulté ou n’a pas consulté les producteurs pour augmenter leur part sociale de 40% n’est pas l’enjeu.

Coton:Le pari de la privatisation

Ce qui est indispensable aujourd’hui, est de trouver les moyens financiers et techniques pour investir dans la filière afin d’installer les nouvelles usines d’égrenage du coton graine et celles transformatrices de la fibre du coton. La préoccupation de la fédération, est d’honorer son engagement de production afin d’atteindre les objectifs de la nouvelle orientation notamment celui de produire 200 000 t de coton graine avec un rendement de 1600 kilogrammes à l’hectare et 95% de bonne qualité d’ici à 2022. Chaque acteur de la filière a l’obligation de jouer pleinement sa partition pour la promotion de cette culture stratégique qui fait rentrer de devises dans l’économie du pays.

F.I : Connaissiez-vous ce nouveau partenaire et quelle appréciation faites-vous de ses activités le cas échéant ?

K.K. : Le voyage d’étude organisé par l’Etat avec tous les acteurs de la filière qui a été conduit par le Ministre de l’Agriculture de la Production Animale et Halieutique au Tchad et en Côte d’Ivoire, a permis aux producteurs de coton de connaitre le nouveau partenaire technique et financier et de capitaliser les acquis de leurs expériences pour donner non seulement un nouveau souffle à la filière mais également améliorer les conditions de vie des producteurs au Togo.

Durant cette mission, les producteurs ont remarqué qu’il y avait une nette différence entre ce qui se passe au Togo et dans ces pays voisins notamment la maîtrise des superficies emblavées, le système d’encadrement, la mécanisation, l’approvisionnement des intrants, la performance des installations d’égrenage, le prix d’achat du coton graine aux producteurs entre autres. L’appui technique et financier du partenaire a permis également à la Côte d’Ivoire d’atteindre un rendement autour de 1100 kilogrammes par hectare. Alors que notre pays a un rendement autour de 700 kilogrammes à l’hectare. Les producteurs ne peuvent que se réjouir de son arriver.

F.I: Quels sont vos craintes et vos espoirs avec cette nouvelle composition de l’actionnariat ?

K.K. : Les craintes, disons plutôt les des producteurs en tant qu’actionnaires de la société cotonnière, consistent à réfléchir aux moyens d’être à la hauteur de leurs tâches vis-à-vis du partenaire technique et financier. Le réseau des producteurs du coton est à pied d’œuvre pour booster la production avant l’arrivée du nouveau partenaire pour une bonne collaboration. Les producteurs sont conscients que la présence du nouveau partenaire va changer beaucoup de choses induisant l’augmentation de la production et l’amélioration de leurs conditions de vie.

F.I : Comment se porte la filière cotonnière dans notre pays ?

K.K. : La filière fonctionne bien mais n’arrive pas à atteindre les résultats escomptés. Quelques soucis de la filière sont liés à la variabilité climatique, la pauvreté des sols, les systèmes culturaux qui ne sont plus adaptés aux sols. La recherche est à pied d’œuvre pour l’amendement de nos sols et préconise les nouvelles techniques d’exploitation des sols : les semis sous couverture végétale, la valorisation des plantes de couverture végétale permettant d’enrichir nos sols, l’utilisation du compost ou d’engrais organique, la mise en place d’une nouvelle variété de semences STAM 190 qui est plus rentable en fibre en remplacement du STAM 129, l’élaboration et la vulgarisation des nouvelles fiches techniques du respect des itinéraires techniques, l’amélioration du système de suivi rapproché aux producteurs. Les acteurs de la filière savent que la mayonnaise n’a pas pris. Ils s’attendent à l’arrivée du troisième partenaire pour relever ces défis.

FI : Comment se portent les groupements de producteurs de coton au Togo ?

K.K. :Tous les pays de la sous-région de même que Togo se sont ralliés aux textes juridiques de l’OHADA depuis 2011 obligeant les entités du secteur agricole à se muter en sociétés coopératives. Le réseau des producteurs de coton n’étant pas en reste, la majeure partie des groupements de producteurs de coton se sont également mutés en sociétés coopératives simplifiées, de même que les unions et la fédération. Les sociétés coopératives simplifiées disposent des nouveaux textes juridiques dans lesquels il y a les équipes spécialisées qui permettent aujourd’hui à ceux-ci de fonctionner normalement.

Qui est OLAM INTERNATIONAL, le partenaire sélectionné par le gouvernement ?

Le réseau compte 3075 organisations de base, vingt-sept (27) unions préfectorales, cinq (05) unions régionales chapoté par la Fédération Nationale. Toutes les faitières du réseau de même que 2500 groupements se sont mutées en sociétés coopératives et organisent régulièrement leur assemblée générale de même que les réunions statutaires telles que le Conseil d’Administration et le Conseil de surveillance.

La fédération tient également les réunions techniques, stratégiques d’orientation, le conseil coopératif permettant de pencher sur le bilan des activités de l’année passée et les perspectives de l’année nouvelle afin d’asseoir une bonne gouvernance au sein du réseau des cotonculteurs.