Dans un courrier adressé ce 29 octobre au Garde des Sceaux, ministre de la Justice et dont nous nous sommes procurés copie, l’Union syndicale des magistrats du Togo ( USYMAT)demande que les deux circulaires prises les 14 et 25 destinées, selon son auteur, à mieux encadrer la prise des ordonnances de cessation des travaux et des expulsions, soient rapportées.
C’est le premier regroupement des praticiens de droit à réagir officiellement, depuis les sorties polémiques du Garde des Sceaux, ministre de la Justice et celle du président de la Cour suprême relatives aux procédures judiciaires en matière de contentieux portant sur le foncier. Dans un courrier adressé ce jour au premier, les magistrats membres de l’USYMAT contestent le fondement juridique des circulaires prises.
En effet, le 14 octobre dernier, Pius Agbétomey instruisait les présidents des tribunaux et cours d’appel, de procéder, autant que faire se peut, à une enquête sommaire consistant à une vérification des allégations sur les lieux, ce aux frais du requérant de l’ordonnance ; ou à défaut d’exiger un constat fait par un huissier de justice autre que l’huissier initiateur de la requête, avant toute signature d’une ordonnance portant cessation de travaux ou ouverture de porte sur le fondement des articles 163 alinéa 2 et 215 du code de procédure civile.
Fondant leur argumentation sur lesdits articles, les magistrats estiment que le législateur a laissé aux bons soins des présidents de juridictions l’appréciation souveraine du bienfondé des requêtes aux fins de mesures urgentes lorsque les circonstances exigent qu’elles ne soient pas prises contradictoirement. Les présidents disposent à cet effet d’un large éventail d’indices dans l’appréciation des motifs à l’appui desdites requêtes au rang desquelles celles aux fins de cessation de travaux ou d’ouverture de porte visées par ladite circulaire. « En enfermant la prise des ordonnances prescrivant ces mesures dans ce formalisme exigeant et exhaustif, la circulaire n°001/MJL/SG du 14 octobre 2021 crée manifestement, en violation de la norme supérieure, une nouvelle règle de droit qui restreint le champ d’application des dispositions légales ci-dessus » écrit Adamou Békéti, Avocat général près la Cour Suprême et président de l’USYMAT.
En outre, les ordonnances à pied de requête relevant, de toute évidence, des fonctions juridictionnelles des présidents des tribunaux et cours d’appel, « la circulaire ministérielle leur prescrivant des procédures impératives relatives à la prise des ordonnances à pied de requête portant cessation de travaux ou d’ouverture de porte est manifestement illégale » conclue-t-il.
Question d’ordre
Selon l’USYMAT, il ressort de la formule exécutoire que revêtent les expéditions des arrêts, jugements, mandats de justice, et tous actes susceptibles d’exécution forcée, que quand la République mande et ordonne aux procureurs généraux près les cours d’appel et aux procureurs près les tribunaux de faire exécuter toutes décisions, loin de s’agir d’une faculté, il est plutôt question d’un ordre. « En demandant aux parquetiers de veiller scrupuleusement à ce que les ordonnances prises par les présidents des tribunaux et cours d’appel respectent les prescriptions de la circulaire n°001/MJL/SG du 14 octobre 2021, cette seconde circulaire fait de ces parquetiers une juridiction supérieure ayant pour mission d’exercer un contrôle a posteriori des décisions de justice. Ici encore, la circulaire n°002/MJL/SG du 25 octobre 2021 crée manifestement un droit non prévu par le législateur » dénonce le syndicat pour qui les deux circulaires créent un grief sérieux aux magistrats ainsi qu’aux justiciables.
De fait, demande-t-il au ministre de « bien vouloir les rapporter purement et simplement ».