Comment produire ce que nous consommons

0
390

Le promoteur du Festival La Marmite de Lomé (15 au 20 mai) insiste sur l’importance de faire connaître le savoir-faire des Africains en matière culinaire, autant qu’en agriculture.

Pour matérialiser l’ambition de « nourrir l’Afrique » et d’offrir un nouveau dynamisme au secteur agricole, des grandes initiatives privées et publiques émaillent le continent. Parmi elles, le Festival international La Marmite (FESMA) qui prépare sa troisième édition.

L’événement est destiné à « valoriser les saveurs africaines, à promouvoir les produits africains et le consommer africain, et il réunit les chefs cuisiniers de l’Afrique et du monde, tout l’écosystème agroalimentaire », explique son organisateur, Jean-Paul Agboh Ahouelete. Le FESMA 2024 se déroulera à Lomé, au Togo, du 15 au 20 mai – et non pas à la mi-avril comme annoncé précédemment –, pour célébrer l’excellence et la diversité de la cuisine africaine.

Ce rendez-vous sera « un cadre de rencontres, d’échanges et de partages d’expériences entre tous les acteurs du monde culinaire et ceux de la chaîne agroalimentaire, les producteurs, les transformateurs, les artisans, les distributeurs, les industriels et le public », détaille Jean-Paul Agboh Ahouelete.

Les organisateurs veulent mettre un accent particulier « sur la question de la transformation des produits agricoles et des chaînes logistiques associées, mais aussi faire la promotion du savoir-faire et des richesses culinaires africaines à travers la valorisation des produits locaux ».

De la ferme à l’assiette, il n’y a qu’un pas : FESMA est l’occasion de revisiter des mets locaux et africains, des ingrédients, des techniques de préparations ainsi que l’art de table. Il promeut une meilleure valorisation et une transformation plus nutritive des produits africains, afin de parvenir à une alimentation saine et équilibrée. Les exposants ont l’obligation de présenter des produits africains cultivés en Afrique et d’en montrer toutes les qualités nutritives.

C’est pourquoi le thème retenu cette année sera : « Les enjeux de la transformation agricole et de la valorisation des produits locaux ». Une occasion pour les visiteurs et les exposants de dresser un plaidoyer pour une alimentation saine et équilibrée, d’inviter à une prise de conscience dans la protection et la préservation de l’environnement, d’attirer l’attention sur les risques climatiques et de promouvoir les cultures locales pour juguler le fléau de la malnutrition.

Parmi les principales activités, une foire culinaire et agroalimentaire, des séances de dégustation gratuite, une dizaine de master class et d’atelier de cuisine, des tables rondes, un colloque scientifique avec l’université de Lomé, des concerts et un dîner de gala.

Toutes les questions de la pêche, de l’aquaculture, de l’agriculture et de l’élevage seront abordées au cours de ce festival pour pousser les réflexions et les analyses sur les défis de la sécurité alimentaire en Afrique et la valorisation des produits africains. Une manière de montrer les défis du secteur agricole, de fédérer le public, les passionnés de la cuisine, les acteurs agricoles et culinaires, les institutions et les entreprises pour mener une réflexion sur les nouveaux modes d’alimentation et de consommation qui répondent aux besoins spécifiques des populations africaines.

« L’objectif principal de ce festival est de promouvoir les saveurs et les traditions africaines à travers la valorisation des produits locaux et des richesses culinaires togolaises et africaines, mais aussi valoriser ensemble ces produits que nous avons en commun et de voir comment les produits que nous consommons sont travaillés au quotidien, produits et transformés à l’autre bout de l’Afrique. Et le message clé du FESMA est « Produire ce que nous consommons et consommons ce que nous produisons » », résume Jean-Paul Agboh Ahouelete.

Renforcer la filière agricole

Plus de 200 exposants venant de plusieurs pays africains, des dizaines de milliers de visiteurs et des institutions vont profiter de cet espace de rencontres et de dialogues pour redynamiser les activités agroalimentaires, goûter les saveurs africaines et proposer des solutions pour un développement durable et efficace. Ce festival est principalement destiné aux professionnels et les amateurs de la cuisine et de l’agroalimentaire qui valorisent les saveurs africaines.

« Aujourd’hui quand vous parcourez l’Afrique, du Togo au Bénin, en passant par la Guinée, le Sénégal, la Côte d’Ivoire et le Nigeria, c’est tout un voyage culinaire que vous parcourez », se félicite Jean Paul Agboh Ahouetele. « Vous découvrez des senteurs et de saveurs qui vous laissent perplexes. C’est tout ça que nous souhaitons valoriser chaque année à travers ce festival international la marmite pour montrer que l’Afrique est un continent densément riche en ressources humaines, ressources naturelles et en ressources agricoles. »

Ce festival sert également de caisse de résonnance aux appels à la diversification de l’économie ; le renforcement des politiques agricoles et industrielles est une des voies permettant d’atteindre l’autosuffisance alimentaire. Dans ce cadre, les produits céréaliers, comme le mil, le sorgho, le fonio et les légumineuses, le maïs ou le manioc sont bien des produits locaux avec une valeur notionnelle importante, excellents pour la santé de par leurs apports énergétiques, de protéines, mais aussi en fibre et en vitamine. La culture des fruits et légumes doit rentrer dans les politiques agricoles et durables. Il semble nécessaire de valoriser et transformer les produits à travers des usines de transformation implantées localement.

Sur le plan financier et celui du savoir-faire, enfin, le renforcement des capacités des agriculteurs et des exploitants agricoles, l’élaboration des cahiers de charges pour les acteurs de la filière et le financement seront abordées lors du FESMA, dans l’optique d’améliorer le rendement et la productivité.

L’exemple du Togo

D’où la nécessité pour chaque État d’avoir une politique de développement viable et fiable qui tient en compte les aspirations des populations en matière de développement. Pour que les besoins primaires ne deviennent pas un luxe, les initiatives locales, nationales et régionales doivent se renforcer à travers les grands ensembles économiques régionaux pour pouvoir coordonner les stratégies et les réponses face au dérèglement climatique, la fertilisation des sols, l’approvisionnement des engrais, l’amélioration de la productivité, le renforcement des techniques et pratiques agricoles, la réduction de la pauvreté, de la malnutrition et de la dépendance alimentaire et l’accompagnement des agriculteurs.

Au Togo, qui accueille le FESMA, les autorités ont pris le taureau par les cornes. Avec la crise mondiale de blé à cause de la guerre en Ukraine, une série d’initiatives sont prises par les autorités pour trouver des céréales alternatives au blé. L’augmentation du prix de pain au Togo a poussé les autorités à réfléchir sur des mesures et solutions urgentes. D’ailleurs, le Festival consacrera « une journée du pain », au cours de laquelle l’ensemble des céréales alternatives au blé seront exposées au public ; elle comprendra une dégustation de pain, de croissant et d’autres produits de pâtisserie qui sont réalisés à partir du sorgho et d’autres produits locaux.

Les autorités togolaises ont pris une série de mesures pour soutenir l’agriculture avec l’installation d’une plateforme industrielle destinée à la transformation et la valorisation des produits agricoles. Le gouvernement consacre un important budget pour répondre au problème du secteur agricole et au développement rural, prévoit de renforcer le crédit agricole, de développer les chaînes de production agricoles qui présentent un potentiel important en matière d’emplois et d’exportations.